Bataille de MOHACS/ déroulement

Bataille de MOHACS/ déroulement


La phase préliminaire qui coïncide avec celle d'approche, consiste pour les Ottomans à éliminer toutes forces susceptibles d'entraver leurs axes de ravitaillements ou de les attaquer par l'arrière.

Au départ, les plans de batailles ont été articulés autour d'une action offensive pour les ottomans, et une manœuvre retardatrice pour les Hongrois.
La chronologie des opérations des forces ottomanes est définie par deux dates phares:

Ø  L'armée a atteint Belgrade vers la fin du mois de juin
Ø  Le retour aux garnisons devrait se faire avant l'hiver

Pour la Hongrie, le système féodal caractérisé par sa lenteur, n'a pas permis de réunir les fonds nécessaires à l'engagement des mercenaires. Les Hongrois ont été en quelque sorte, surpris par cette attaque ottomane. Le facteur "délais" n'était pas favorable aux Hongrois qui devaient attendre l'arrivée des forces de Transylvanie, de Croatie, et des mercenaires.
Stratégie de guerre pour la paix
Cette situation a donc, dicté deux plans de batailles:
Pour les Ottomans, l'idée de manœuvre[1] était claire: Faire déplacer la force principale par la rive ouest du Danube après la prise ou fixation des forteresses qui pourraient gêner les axes d'approvisionnement; traverser le Drave au niveau d'Eszek, puis rechercher les forces hongroises, les détruire dans une bataille décisive et s'emparer de Buda, la capitale du pays.

Pour les Hongrois, l'idée de manœuvre[2] au départ était: Se porter plus au sud du pays et y mener un combat retardateur, dans le but de bloquer les Turcs derrière les affluents du Danube qui parcourent la plaine hongroise,  en attendant l'arrivée du soutien, principalement les forces de Transylvanie commandées par le voïvode Szapolyai.

Cependant, le voïvode Szapolyai, gouverneur de Transylvanie, ne voulait intervenir qu'une fois toutes les données concernant l'ennemi sont réunies. De plus, la divergence des points de vues entre la cour et la noblesse a conduit à une division sur le plan politique. Le manque d'informations précises sur les intentions de l'armée ottomane, a été à l'origine des multiples tergiversations du Roi.

Du côté ottoman, le sultan Soliman Le Magnifique qui a quitté Constantinople le 23 avril, atteignit Adrianople le 03 mai. Le 08 mai, il quitte cette ville, janissaires en tête. L'armée du Sultan a par la suite, atteint Philippolis (actuelle Plovdiv) le 19 mai, où d'autres forces les ont rejointes, venant des différentes provinces de l'Empire; et la colonne de marche devenait considérable.
Les spécialistes hongrois rapportent que durant cette marche, l'armée ottomane était bien organisée, et disciplinée. La population n'a pas fait l'objet d'actes de pillage ou de mauvais traitement, comme il a été d'usage durant les différentes campagnes de l'histoire. Une garde a en fait, été montée par le Sultan pour veiller à la sécurité de la population. 
Arrivé à Sofia le 29 mai, cette ville qui était d'une grande importance pour le réapprovisionnement de l'armée ottomane, le Sultan avait déjà réuni toutes ses forces, et réorganisé son dispositif logistique, en vue de conquérir ses objectifs immédiats. En effet, le contrôle des axes logistiques imposa aux Ottomans, la destruction des centres de résistances qui se trouvaient sur le Danube.
Ainsi, après avoir supervisé la construction du pont sur la Save ayant permis la traversée de ce fleuve, la première mission dont a été chargé le grand vizir Ibrahim, était la conquête de Petervarad. Ce fort situé sur le Danube entravera l'avancée de la flotte. Il peut aussi mettre en danger les lignes d'approvisionnement s'il est dépassé et laissé sur les arrières de l'armée ottomane. Il a été gardé par un millier de soldats.
Ibrahim a établi le siège de cette forteresse le 14 juillet à l'aide de l'armée de Roumélie constituée de 2000 janissaires, 150 pièces d'artillerie, et une flottille. Le 17 juillet, l'armée de l'Anatolie a rejoint les assiégeants. La garnison a défendu avec bravoure et fait plusieurs pertes du côté ottoman, mais les forces de Roumélie ont pu ouvrir une brèche le 28 juillet et s'emparer du fort.
Après cette étape, le commandement turc a procédé au siège d'Ujlak. L'opération a été lancée le premier août avec les mêmes moyens que ceux de Petervarad, mais en incluant les forces venues de Croatie et de Transylvanie. Après une semaine de lutte, les défenseurs ont dû se rendre. D'autres petites garnisons à Sremone ont été prises entre temps sans qu'elles opposent de résistance, comme si elles attendaient l'arrivée des Ottomans.

N'ayant pas réussi à arrêter les forces ottomanes au sud des affluents du Danube, les Hongrois ont construit leurs hypothèses autour des possibilités du terrain de Mohacs afin d'ôter la liberté d'action à l'ennemi.

Une fois l'armée ottomane a traversé le fleuve Drave et le terrain boueux situé sur sa rive nord, elle atteignit la vallée détrompée de Karasso[3]. L'ayant traversée en suivant la ligne Baranyavar-Baranyabar-Baranyakisfalud, le 28 août, elle campa sur une longueur avoisinant 9 kilomètres. Ainsi, l'armée turque fut plus prompte et réussit à franchir le dernier affluent du Danube alors que l'armée hongroise s'en approchait à peine. L'armée hongroise était obligée donc, d'établir son camp à Mohacs. En effet, son plan de départ, visant à bloquer les Turcs derrière les affluents du Danube a échoué à cause du retard pris pour quitter Buda.
L'armée ottomane a dû atteindre le champs de combat de Mohacs après une journée de marche, et au jour  "J". Le déploiement de 150 000 combattants n'était pas question facile en raison de la nature du terrain et de l'aire disponible. Naturellement, cette contrainte a été dictée par l'ennemi qui, connaissant le milieu, a choisi une zone de combat qui rendrait le déploiement des Ottomans difficile. Cette portion de terrain est précisément l'aire située au pied des terrasses dominant la vallée de Mohacs.
Ainsi, compte tenu des possibilités de déploiement des forces ottomanes, le commandement hongrois a tablé sur les évolutions suivantes:
Le jour précédant la bataille, les Ottomans camperaient sur la rive de Karasso, puis débuteront leur déploiement à partir de ce point. Le site ne pourrait pas se situer au sud de la rivière Karasso, car dans ce cas, l'armée ottomane aurait à surmonter le jour même de la bataille, les obstacles que présentent les marécages situés le long de cette rivière. D'autre part, l'armée ottomane ne procéderait en aucun cas à une formation de marche à l'ennemi pour atteindre Mohacs, car dans ce cas les derniers éléments de la colonne, qui est de 120 à 130 kilomètres de longueur, n'atteindront les lignes de contact que dans quatre à cinq jours après.  D'autant plus que le commandant en chef de l'armée hongroise, Tomori, sait que l'ordre de bataille de l'assaillant a été formulé avant le jour "J".
La zone de déploiement totalisait 57Km² et comportait une douzaine de villages, présentant plusieurs entraves à la mobilité des forces ottomanes. En effet, les champs cultivés occupent une grande partie de cette surface et donc, il n'était pas facile de progresser dans une terre arable. La position des Ottomans s'est empirée avec les pluies fortes qui ont précédé la bataille rendant le sol boueux.  De plus, Les crues d'eaux ont causé l'inondation des terres basses avoisinant le fleuve. Le chroniqueur turc Djeladzade écrivait:"…au moment où nos forces ont attaqué à partir des hauteurs, les eaux du Danube se répandaient comme une mer."    
Enfin, durant cette période, il n'y avait pas de carte pour pouvoir étudier le terrain. La familiarisation avec le milieu était un critère essentiel pour le choix du champ de bataille. Le commandant en chef de l'armée hongroise voulait éviter à tout prix que les chefs ottomans obtiennent de telles informations. Pour cela, la cavalerie légère hongroise a combattu avec acharnement et en permanence, durant les trois jours précédant la bataille, les éléments de reconnaissance ottomane.
Le commandement ottoman devait finalement s'attendre, durant son déploiement, à deux surprises liées au terrain:
Ø         La première est que l'armée ne peut se déployer pour la bataille que sur l'intervalle de 6 à 7 Km entre Majs et Buziglica. Ainsi, le front s'est rétrécit pour les 120 000 cavaliers et donc, l'ordre de bataille a dû être altéré. Les chefs ont été obligés d'augmenter le déploiement en profondeur des unités. Ce réaménagement de l'ordre de bataille a pris un temps considérable.
Ø        La seconde surprise, que Tomori et ses compagnons ont bien prévue, est due à la nature des collines de campement des Ottomans. En fait, il était difficile de préparer une attaque brève à partir des pentes détrempées et glissantes.
Prenant en compte ces données dès le départ, le commandement hongrois estimait que les Ottomans ne vont pas atteindre la vallée de Mohacs tous au même temps, ou du moins, dans des conditions physiques nettement affaiblies. Ces hypothèses leur ont donné l'espoir de pouvoir détruire les composantes de l'armée l'une après l'une; donc à pouvoir neutraliser l'avantage offert par le rapport de forces à l'ennemi.
Pour leur dispositif de combat, les Hongrois ont adopté la solution classique consistant à s'aligner sur deux échelons, avec le premier scindé en trois segments: une aile droite, un centre, et une aile gauche.
Ce n'était pas sécurisant ni pour les ailes d'exécuter un encerclement sans un centre solide, ni pour le centre de percer sans la couverture de ses flancs. De plus, une partie de l'infanterie était disséminée au sein des rangs de cavalerie. Ce faisant, les chefs devaient sacrifier les avantages qu'offrait la force de choc des cavaliers et la puissance de l'infanterie. L'attaque lancée par la force de choc hongroise, constituée par les cavaliers en armures, était insurmontable. Tomori et ses compagnons ont fondé leur plan sur cette donne. Il était donc nécessaire de freiner la brutalité de la cavalerie légère ennemie en disposant des unités d'infanterie à l'intérieur des formations de cavalerie en armures afin  d'augmenter l'efficacité de cette dernière.
Ainsi, l'armée hongroise était répandue sur un front de 4 Km. Compte tenu de l'effectif, ce front était trop large. Mais, le commandant en chef de l'armée tenait à s'étaler aussi large que possible pour diminuer les risques d'encerclement par l'ennemi.
Le second échelon était constitué de cinq rangées, la place du Roi était à la quatrième. Cet échelon ne représente que le septième ou le huitième du premier échelon, et peut être considéré plutôt comme une réserve. Il est constitué par le gros des formations dotées d'armures lourdes. La défense des ailes a été constituée par la cavalerie légère et des unités d'infanterie. Au centre, 1000 fantassins faisant partie d'une armée de 40 000 combattants, constituent une masse solide.
En résumé, l'ordre de bataille de l'armée hongroise était le suivant:
     L'infanterie répandue sur 1 Km de front et 10 rangées en profondeur. Trois kilomètres de ligne de front étaient constituées par les ailes dont:
Ø      La droite commandée par Batthyány a pour mission d'attaquer et détruire l'armée de Roumélie,
Ø      La gauche, constituée par la cavalerie légère et  conduite par Perenyi, a pour mission d'assurer la couverture face à l'Est et fixer l'armée d'Anatolie,
Ø      Le centre a pour mission d'attaquer et détruire l'armée du Sultan, située au centre du dispositif ottoman.
Un total de 6000 cavaliers a été réparti sur six rangées. L'armée a été en tout étalée sur 4 Km. L'artillerie quant à elle, était répartie sur le premier échelon et constituée de 80 pièces à moyenne portée.
Le second échelon a été étalé sur une ligne beaucoup plus étroite que celle du premier. Il est claire que le haut commandement hongrois a sous-estimé les portées de la bataille et ne s'attendait pas à l'assaut qui sera lancé par les Ottomans.

Arrivés sur le champ de bataille à Mohacs l'après-midi du 29 août, les chefs ottomans ont dû réaménager leur ordre de bataille en fonction des contraintes du milieu.

Comme il a été mentionné auparavant, le 28 août l'armée ottomane campait sur les rives nord de la rivière de Karasso. L'après-midi, il a été mentionné que la bataille aura lieu le jour suivant. Le 29 août, l'armée a entamé son déploiement juste après la prière de l'aube, vers 05 heures. Le chroniqueur turc Djeladzade décrit ainsi la scène:"dès les premières lueurs de l'aube, les soldats brûlant d'envie de combattre, se déplaçaient comme les vagues de la mer, brandissant les bannières. L'infanterie et la cavalerie constituaient le centre invincible, et les ailes étaient bien équipées." 
Sous le commandement du grand vizir Ibrahim, l'armée de Roumélie avec ses 4000 janissaires et ses 150 pièces d'artillerie, était la première à ouvrir les feux. Cette armée devait couvrir une zone de 12 à 13 Km pour atteindre le terrain situé entre Majs et Foldvar. L'armée anatolienne devait couvrir 6 à 8 Km pour être dans la région de Buziglica. De plus, Ibrahim de par sa fonction de commandant en chef de l'armée, devait contrôler le terrain et organiser l'ouverture d'une ligne de débouché pour le restant de l'armée.
Le journal personnel de Soliman II décrit la façon de déploiement des forces : "le centre de la formation, à cheval, avançait par étapes en alternant des phases de haltes et de mouvement, a atteint la région de Mohacs avant 14 heures". La progression a été lente, car les Ottomans ont dû s'arrêter à plusieurs reprises pour réaménager leur dispositif. Concernant les ailes, les forces anatoliennes étaient sur la plaine de Mohacs entre 14 et 15 heures, et les forces de Roumélie vers minuit du 28 août. 
La marche était lente, épuisante; le commis de Soliman II notait que lorsque l'armée atteignit le collines dominant le champ de Mohacs, " les hommes et les bêtes étaient épuisés". En effet, bien que la distance de marche soit faible, les aléas du terrain ont entraîné des canalisations et par la suite le freinage de la formation.
S'étant rendu compte qu'ils ne pouvaient pas attaquer à partir des pentes glissantes des collines, le haut commandement a dû réorganiser son dispositif et s'installer sur la vallée. Faisant partie de l'avant-garde constituée par 12 000 janissaires armés de mousquets[4] et de 500 zarbuzan, le Sultan a entamé son déploiement le matin. Quand il fut en mesure d'observer l'ennemi, ses espions lui ont rapportés que l'effectif de ces derniers était très important, et qu'ils étaient entrain de creuser une tranchée courant d'une colline jusqu'au fleuve du Danube.
Les chefs militaires devaient donc, étudier la nouvelle situation. Selon Kemal Pashazade, "quand Ibrahim a pu observer les Hongrois, il a demandé l'avis de ses conseillers car l'ennemi était bardé d'acier de la tête jusqu'aux orteils".et qu'il "pouvait percer par un assaut n'importe quel dispositif". Le Commandant d'armée Bali, "vieux loup turc", a suggéré qu'au lieu d'attendre une attaque de la part des Hongrois, ils procèderaient par l'astuce de dégarnir leur centre et d'en ouvrir les ranges afin d'y attirer la puissante cavalerie hongroise, puis attaquer par les flancs.   
Durant cette ultime phase, ni les réserves, ni l'infanterie hongroises ne pourront faire face aux artilleurs et janissaires ottomans après l'enveloppement des forces de Louis II.

Le 29 août, la météorologie fait apparaître un plafond haut. L'armée hongroise a élaboré son ordre de bataille au lever du jour. L'avant-garde ottomane, jalonne l'ennemi et opère de temps à autre des combats violents avec la cavalerie légère hongroise. La majeure partie de l'armée ottomane était encore dissimulée derrière la ligne de crête passant par les sommets des collines, et ses intentions ne sont toujours pas déterminées par les Hongrois: est- elle entrain de se préparer à une attaque surprise de nuit, ou veut-elle les attirer dans une position défavorable ou simplement, est-elle entrain de les épuiser.
Au soir, les Hongrois ont pu localiser l'ennemi dans la vallée et au pied des collines. En fait, ils n'ont pu voir que les bouts des lances qui, éclairées par le soleil couchant, émettaient des reflets. C'étaient les troupes commandées par Bali et Khosrev. D'autre part, le Roi a été informé que les Ottomans étaient entrain d'installer leurs tentes. Il a alors ordonné à ses troupes de rejoindre les campements car, l'ennemi ne compte pas attaquer le même jour. Notant que l'armée de Roumélie a commencé de descendre les versants des collines et que les troupes conduites par Bali avançaient vers le flanc de l'armée hongroise, Tomori est allé notifier le Roi que "l'armée de Roumélie a commencé à installer ses tentes. En fait, le tiers seulement de l'armée ottomane, deux cinquièmes au plus, étaient sur le champ de combat. C'était le moment propice pour attaquer".
Le Roi a été convaincu par ses commandants d'armées qu'ils devaient attaquer les Ottomans à l'instant même car, le lendemain, le gros des forces ennemies sera sur le champ de Mohacs. Il a ainsi, scindé son armée en trois parties parmi lesquelles, deux devront s'opposer aux ailes ottomanes composées par l'armée de Roumélie et l'armée d'Anatolie; alors que lui-même à la tête d'une armée de cavaliers en armures, se lancera avec fougue comme une montagne d'acier dans le piège, dans le fol espoir de s'emparer du Sultan lui-même.             
Au début de la bataille, l'armée ottomane a été déployée comme suit:
L'essentiel des troupes des Commandants Bali et Khosrev avait pour mission de freiner les troupes du Commandant hongrois Raskay en évitant d'engager le combat. L'armée de Roumélie était aux pieds des collines, sur la plaine de Mohacs, et préparait le campement. Les unités conduites par le Sultan, descendaient encore les terrasses au niveau du village de Foldvar; alors que l'armée anatolienne est située plus en arrière.
Après  réception  de l'ordre  d'attaquer, l'artillerie  hongroise  a ouvert  le feu  et l'aile droite[5] commandée par Tomori  a commencé le tir. L'infanterie  lança alors l'attaque  mais naturellement, restée loin derrière la cavalerie. L'aile droite  avait  pour objectif  la destruction  du centre  de l'armée  de Roumélie, alors que l'infanterie  fait face aux janissaires et à l'artillerie situés sur le flanc droit de cette armée.
L'infanterie hongroise a pris contact avec les janissaires et leur artillerie, une demi-heure après, soit au moment où le deuxième échelon ottoman atteignit les lignes de contact. Les réserves et l'aile gauche[6] sous le commandement de Perenyi ne sont pas intervenues encore, puisque leur ennemi, l'armée anatolienne, n'est toujours pas en vue. Quant à l'armée située sur l'aile droite, grâce à sa puissance, elle a pu opérer une percée dans les rangs de l'armée de Roumélie. Cette dernière qui était épuisée par les efforts fournis durant la marche et après par l'installation du bivouac, a été entièrement surprise. Prise par la panique, elle a dû fuir à la hâte les feux hongrois.
Le journal de Soliman, rédigé dans un style hésitant, décrit cet événement: " …et puisque l'armée de Roumélie était dispersée, elle ne pouvait pas résister, alors une partie s'est sauvée en direction du Protecteur".
Au moment où les troupes hongroises de l'aile droite étaient entrain de réunir le butin laissé par l'armée de Roumélie qui avait pris la fuite, l'essentiel de l'armée centrale ottomane, y compris les janissaires, avait atteint le pied des collines. Ces derniers ont alors ouvert le feu sur l'aile droite hongroise. Ces tirs n'ont pas seulement terrifié les troupes qui ont commencé à se retirer et parfois à se sauver, mais aussi, leur ont causé de lourdes pertes.
Au moment où les éléments de l'aile droite ont pris la fuite, le dispositif hongrois composé de chevaliers en armures lourdes et conduit par le Roi, avait déjà lancé l'attaque. Cette action du centre intervient donc à l'instant même où l'opération lancée par le commandant en chef, Tomori, a échoué. On rapporte aussi que les feux des janissaires ont coïncidé avec le début de l'engagement de l'armée anatolienne. A ce stade, prennent effet les conséquences de la perte de temps faisant suite aux multiples tergiversations du commandement hongrois à entreprendre une opération défensive, tout au début de la campagne. Ce retard sera fatal pour les Hongrois, car il sera à l'origine de l'échec du Plan de Tomori.  Ce plan qui n'a été révélé au Roi qu'à l'instant même de l'attaque n'a pas pu profité de l'effet de surprise qui était son essence. C'était une improvisation pour le Roi et l'ensemble de l'armée. Le temps pris pour le discuter a permis aux Ottomans de disposer des délais nécessaires pour se réorganiser.
Ainsi, la défaite du flanc droit hongrois signifie ni plus ni moins que la bataille a été désespérément perdue.

En effet, alors que la majeure partie de l'armée turque était encore dissimulée derrière les collines, les Hongrois passèrent à l'attaque. Leurs lignes s'enfoncèrent dans le dispositif turc qui procéda à un repli tactique. Mais une fois les cavaliers hongrois eurent repoussé la cavalerie turque, ils se retrouvèrent nez à nez avec l'artillerie et les janissaires retranchés. Un combat sanglant a eu lieu au cours duquel la cavalerie hongroise ne pouvait résister pour très longtemps. Il y a eu un retournement de la situation. En fait, les décharges furent terribles et les quelques chevaliers hongrois qui réussirent à franchir ce rideau défensif, furent faits prisonniers peu après.
Pendant ce temps, l'avance de la cavalerie ottomane de la seconde ligne fut trop prompte et laissa en arrière l'infanterie. Alors que sur les pentes des collines se livrait une mêlée acharnée de cavaliers. L'infanterie hongroise fut peu à peu enveloppée par un corps de cavalerie turc qui avait contourné le champ de bataille par l'ouest. Les chroniqueurs ottomans rapportent qu'une fois les attaques des réserves furent repoussées par le centre, elles se sont scindées et ont continué la lutte contre les armées de Roumélie et d'Anatolie situées sur les flancs.
Ainsi, ne disposant plus de réserves pour contrer ce mouvement, les Hongrois commencèrent à reculer pour très vite paniquer et fuir vers leur camp, puis vers le Nord en direction de la capitale, quand ils s'aperçurent que leur campement était déjà en proie au pillage des akinji[7] turcs.
L'infanterie entourée de tous les côtés par l'armée ottomane a adopté vraisemblablement un dispositif en forme de losange et combattu plus longtemps. Mais à la fin, elle a péri presque jusqu'au dernier homme.
Pratiquement, la bataille a pris fin avec l'annihilation  de l'armée  hongroise. En plus  du Roi, 28 magnats[8], 7 prélats[9], presque 500  personnes de la noblesse, 10 000 fantassins  et 4000 cavaliers y ont laissé leurs vies.

La bataille de mohacs a durée  du 28 août à 13 heures jusqu'à minuit du même  jour. Le 31 août, la marche sur Buda  a été décidée, but recherché par cette campagne. Le 1er  septembre, 30 à 50 000 corps ont été posés sous terre dans la vallée de mohacs, y compris les morts  ottomans. Avant de quitter  cette vallée, les chefs ottomans ont ordonné à leurs troupes de brûler et de détruire les champs et les villages. Ainsi, plusieurs  atrocités ont été commises; Le chroniqueur  turc Kemal  Pashazade  décrit ces scènes : " la cavalerie ne connaissait pas de sympathie. Dispersée dans les provinces, comme les inondations produites par un fleuve, elle brandissait ses sabres, brûlait tous les foyers, …aucune pierre des églises, ni des monastères n'a demeuré à sa place…".
Le 2 septembre, le Sultan quitte Mohacs. Entre temps, il a ordonné l'exécution des prisonniers mâles et la libération des femmes. Il aurait cru que l'armée qu'il venait d'affronter n'était que l'avant-garde d'une armée plus conséquente. Le 6 septembre, il quitte la ville Tolna. Après la prise de la ville Buda qui a été désertée de sa population, 300 soldats ont été chargés par le Sultan de mettre la ville à feu après leur séjour qui y a duré deux semaines. Le 23 septembre, les Ottomans quittent donc le pays. La colonne conduite par Soliman II longeait le Danube, flanc gardée par la colonne conduite par Ibrahim contre le gouverneur de Transylvanie, le voïvode Szapolyai, qui était de l'autre côté du fleuve Tisza. Szapolyai cherchait à barrer la route à l'armée ottomane au cas où celle-ci déciderait d'envahir sa province.


1.  ouvrage"the fall of the medieval kingdom of Mohacs" G.PERJES
2.  G.PERJES
1.  Vallée située au sud de Mohacs, traversée par la rivière Karasso
  1. Arme à feu portative du XVI°et XII°siècle
1. Droite = ouest
2. Gauche = est
1. Soldats irréguliers
2. Membres des grandes familles nobles dominantes en Hongrie
3. Dignitaire ecclésiastique
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